Julien Cassier & le GdRA

Julien Cassier | Biographie

Acrobate de formation, Julien Cassier est un artiste pluridisciplinaire.

Depuis 1999 où il participe à la fondation de différents collectifs dont Baro d’Evel et la Clique, il ne cesse de produire et partager des œuvres et multiplie les collaborations artistiques. 

Son parcours qu’interprète, le mène à participer à la création du Luthier de Venise, au théâtre du Châtelet à Paris, un opéra de Gualtiero Dazzi, mise en scène Giorgio Barberio Corsetti avec une Direction musicale d’Alain Altinoglu.

En 2024 avec Aurélien Bory et la Compagnie 111 il créé la pièce Plus ou moins l’infini mise en scène par Phil Soltanov. 

À la même période, il collabore avec le Groupe acrobatique de Tanger sur le spectacle Taoub mise en scène par Aurélien Bory, sur Chouf OuChouf de Zimmermann - de Perrot et FIQ mise en scène par Maroussia Diaz Verbèke. 

En 2005 il fonde le GdRA, qui fut invité au Festival d’Avignon en 2010 avec Singularités Ordinaires et Ethnographiques. Au sein de la compagnie il conçoit les pièces, pense les dispositifs scénographiques et chorégraphie. Il réalise des prises de son et d’images. Au plateau, il interprète la plupart des projets en tant qu’acteur, danseur et performeur. En 20 ans près de 30 pièces voient le jour.

En 2015 collabore à la chorégraphie avec la compagnie réunionnaise Circons Flex sur La pli i donn.

En 2018 il collabore à la mise en scène de l’opéra l’Enlèvement au sérail de Mozart sous la direction musicale de Julien Chauvin et le concert de la Loge, à l’invitation de la Co[opéra]tive.

Comme interprète depuis 2018 il joue régulièrement dans Talk-Show une pièce de Gael Santisteva.

En 2020, il fait la repirse de Mazùt de Baro d’Evel.

En 2025, il débute une collaboration avec Stéphanie Fuster sur la scénographie qu’il accompagne à la scénographie.

Sur le volet pédagogique, il accompagne les élèves de l’École des Teintureries de Lausanne pour la création d’Anthropologie13.CH, pièce crée au théâtre Vidy de Lausanne puis en tournée en Suisse.

Julien Cassier & le GdRA

En 2005 le circassien, performeur et chorégraphe Julien Cassier et l’anthropologue, auteur, metteur en scène et musicien Christophe Rulhes décident de fonder le GdRA ; et ce, afin d’inviter leurs attachements respectifs au monde paysan sur les plateaux de théâtre. Ils affirment une conception élargie de la narration scénique pluridisciplinaire mêlant arts du cirque et sciences humaines, musique et arts de la scène. Dans le même élan, ils invitent le comédien Sébastien Barrier à rejoindre le collectif, qui sera co-auteur des deux premières pièces de la compagnie.

Inspiré par les mondes universitaires où il évolue alors, sur le modèle des intitulés de laboratoires en sciences humaines auquel il est rattaché, Christophe Rulhes propose au collectif le nom de "Groupe de Recherche Artistique", le GdRA.

La compagnie cherche une articulation entre récit et arts du cirque et du corps, l’engagement physique propre à l’acrobatie se mêlant aux gestes ordinaires et aux récits documentaires. L’image filmée et sa mise en scène est centrale dans les scénographies imaginées par Julien Cassier. La scène devient agrès, elle relie et ouvre des espaces de jeu entre le corps acrobatique et l’image filmée, entre fulgurances des gestes chorégraphiés et récits de vie.

Son format est évolutif selon les spectacles à créer, où prennent part des personnes d’horizons divers : musiciennes, techniciennes, documentaristes, administratrices, productrices, circassiennes, comédiennes, plasticiennes, danseuses, artistes numériques, réalisatrices d’images filmées, chercheuses et scientifiques. Parmi elles, l’ingénieur du son Pedro Theuriet, l’éclairagiste régisseur David Lochen, la costumière Céline Sathal, la créatrice lumière Adèle Grepinet, le peintre illustrateur et performeur Benoît Bonnefritte, l’anthropologue Bruno Latour ou la philosophe Joëlle Zask, et toutes celles et ceux qui depuis l’administration et la production ont porté et portent les écritures : Armelle Vernier, Jean Sébastien Steil, Léonor Manuel, Frédéric Cauchetier, Élisabeth Le Coënt et Alter Machine, et bien d’autres. Toutes ces personnes furent ou sont encore des complices et des inspirations qui ont nourrit l’identité artistique plurielle de la compagnie.

Bien qu’ils mènent aussi des écritures personnelles au sein du collectif, Christophe Rulhes et Julien Cassier co-signent la plupart des œuvres. Depuis l'espace scénique où ils jouent dans nombre de leurs pièces : Christophe Rulhes conçoit, écrit, met en scène, fabrique la musique, partage la scénographie, interprète ; Julien Cassier est concepteur, chorégraphe, scénographe, et réalise prises de son, images et montages, et interprète.

En 2007, le GdRA débute un cycle théâtral que Christophe Rulhes intitule Le Triptyque de la Personne composé de Singularités ordinaires une pièce initiée par Julien Cassier (présenté au Festival d’Avignon 2010), Nour (2011) et Sujet (2014), montrés en France, en Suisse, en Espagne, en Belgique. Pour la Capitale Européenne de la culture à Marseille, la compagnie crée Vifs, un musée de la Personne (2013) où Christophe Rulhes écrit à l’invitation de Bruno Latour, à partir de son article « la mondialisation fait-elle un  monde habitable ? ». Ce texte animé par le dispositif vidéo, entre en écho avec la chorégraphie au trampoline de Julien Cassier. L’installation est régulièrement jouée, notamment reprise en 2019 : Vives, une version féminine de Sevran, avec le Théâtre de la Poudrerie et le Grand Paris Express ; mais aussi en 2024 avec la Fabrique à Toulouse pour Miralh visages vifs.

Depuis 2008, avec un cycle théâtral que Christophe Rulhes nomme Les experts du vécu, , le GdRA écrit une dizaine d’œuvres contextuelles liées à des personnes, des publics, des territoires et des partenaires spécifiques, notamment Commun(s) en 2015 avec l’Université Fédérale de Toulouse, et Lavelanet en 2016 avec la ville éponyme d’Ariège.

En 2016, après une collaboration de Christophe Rulhes avec la compagnie réunionnaise Cirquons Flex, le GdRA crée Lenga. Cette pièce créée au Théâtre Vidy à Lausanne invite les deux artistes de cirque Maheriniaina Ranaivoson et Lizo James. Le collectif voyage en Afrique du Sud et à Madagascar. Ce premier volet de la série La Guerre des Natures, ouvre une enquête théâtrale à travers le monde. 

En 2017, Julien Cassier retrouve la productrice Michiko Tanaka qui propose au collectif de rencontrer Kanroku Yoshida, maître de marionnette Bunraku du théâtre National d’Osaka.  Yori Kuru Mono est créée au Japon, une pièce conçue par le GdRA, mis en scène par Christophe Rulhes, co-écrite avec Kanroku Yoshida. En 2018, à l’invitation de la co[opéra]tive réunissant le Théâtre Impérial de Compiègne, le Bateau Feu de Dunkerque, le Théâtre de Cornouailles de Quimper et les 2 Scènes à Besançon, Christophe Rulhes met en scène l’Enlèvement au Sérail de Mozart et y invite Julien Cassier et l’équipe de création du GdRA ous la direction musicale de Julien Chauvin. 

Après un processus de travail débuté en 2017 en Amazonie guyanaise, le GdRA crée Selve, portrait d’une jeune femme amérindienne Wayana joué de 2019 à 2020. A l’automne 2019, le diptyque des deux premiers volets de La Guerre des Natures, Lenga & Selve est publié aux éditions des Solitaires Intempestifs sous forme de livre disque et laisse se déployer les textes de Christophe Rulhes et l’anthropologie théâtrale qu’il développe. Julien, Cassier réalise pour l’occasion une création sonore mêlant paysages sonores amérindiens et voix enregistrées. Christophe Rulhes poursuit ce travail réflexif avec une thèse intitulée Singularités Ordinaires soutenue en 2023 à l'EHESS et au LAS. 

En 2020 et 2021, le GdRA conçoit Siffleurs de danse, une pièce chorégraphique sur la parole adolescente invitant le geste acrobatique à rendre hommage à l’anthropologue Daniel Fabre ; en 2022 Bois Sacré est créé avec le collectif S'Enforester et Anthropologie13.CH au théâtre de Vidy avec l’école supérieure d’arts dramatiques des Teintureries à Lausanne ; en 2023 le GdRA conçoit une nouvelle pièce donnant une prosopopée Méditerranéenne intitulée Au milieu des terre. Christophe Rulhes la met en scène et co-écrit en compagnie de l’anthropologue Mondher Kilani et de l’océanographe Catherine Jeandel, en tournée en France et au Maghreb en 2023/2024.

En 2024 et 2025, Christophe Rulhes et François Huguet conçoivent La Cham dont Julien Cassier filme les images, pièce paysaniste jouée tant en extérieur qu’en intérieur, à partir d’une enquête réalisée en Lozère. 

En 2025 Julien Cassier décide de porter ses propres pièces au sein du collectif. Christophe Rulhes poursuit les travaux en cours, notament en créant LoRulh avec l'acrobate Tom Colin et en poursuivant pour fin 2026 la conception de Silikeimë, qui signera le retour du GdRA en Amazonie. Cette pièce invite d'ores et déjà sur scène l'artiste et artisan Aimawale Opoya ainsi que la circassienne et performeuse Charlotte Le May, acteurices d’un théâtre amérindien, autochtone, terrestre, décolonial. 

En avril 2026, Consolo sera créé au théâtre Garonne, une pièce de Daniele De Michele réalisée en collaboration avec Julien Cassier. Ce récit autofictionnel mêlant anthropologie, art de faire culinaire et performance, questionne les enjeux politiques et démocratiques de la cuisine quotidienne et familiale au rythme d’une recette de pâtes faite main.

Depuis 2010, le GdRA est conventionné en France par le Ministère de la Culture en DRAC Occitanie, soutenu par la Région Occitanie et par la ville de Toulouse.

 

Julien Cassier | Biographie détaillée

J’ai été conçu au 102 de la rue d’Aubervilliers à Paris. J’ai joué au 104 de la rue d’Aubervilliers plus de 35 ans après… tout ça pour ça.

Dans un élan familial porté par de belles convictions politiques, ma mère secrétaire de direction dans une banque privé et mon père travailleur social décidèrent de faire grandir leur enfant à la campagne. Elle devint tisserande, il alternait son travail de travailleur social entre le CAT du village voisin et sa passion pour la menuiserie. Entre la laine, le bois et la douce folie. 

Je grandi dans le sud-ouest toulousain en bordure de vallée dans une maison isolée sur les coteaux surplombant le village. D’un côté les montagnes ariègeoises et une petite paysannerie en polyculture, de l’autre la nouvelle ère modernisatrice de l’agriculture débutée après-guerre se développe dans la plaine.

Ce revivalisme des milieux ruraux de la fin des années 70 permet la réouverture de l’école du village. Un souffle de vie sur le village, les bals et fêtes de village renaissent, les disco-mobiles alternent avec les groupes de bal musettes, les lotos, les carnavals, les feux de la Saint Jean, les tirs de flèches de la fête du Papogay sont animés. Néo et autochtones créaient une nouvelle assemblée, frictions et accords, échanges et entraides mais renaissance d’une vie rurale. 

Éloigné de ma famille, mes premiers voisins jouent le rôle de grands-parents de substitution. Ils viennent d’Ariège, ils sont paysans, ils viennent de quitter le statut difficile de métayer pour s’installer à leur compte. Ils me gardent quand mes parents travaillent et parlent entre eux une autre langue, le patois occitan. La mémé et le pépé au coin du feu, les vaches sont dans l’étable qui jouxte la cuisine. Cette agriculture à l’ancienne fait appel aux voisins, mes parents participent aux foins et à divers travaux des champs. J’assiste aux vêlages, à l’allaitement du veau sous la mère etc.

Mon enfance de fils des parisiens se fait dans ce terreau, dans ce paysage paysan. J’ai été accueilli, je m’y suis épanoui, jeux d’extérieur, chasse, pêche, élevage, rugby, sports motorisés et passions mécaniques, autant de pratiques que j’embrasse avec plaisir. 

C’est grâce à la pratique du cheval que je découvre les arts du cirque, activité pluridisciplinaire par excellence qui pendra rapidement le pas sur le Rugby où une virilité adolescente se fait déjà très présente, je quitte la voix des oiseaux comme dirait l’anthropologue Daniel Fabre pour me tourner vers les arts. Voltige équestre, jonglerie, acrobatie, clown offrent des prises au jeune homme que je suis. Une tournée en chapiteau et calèche dans les campagnes me marque, montage de chapiteau, voyage au rythme du cheval, rencontre avec le public, représentations. Une sensation de liberté qui ne m’a pas quitté jusqu'à aujourd’hui. 

La vie scolaire et familiale me mène à Toulouse où je découvre l’existence du Lido L’école de cirque de la ville. Je passe 3 années formatrices, je m’initie au jeu et au clown, je découvre la jonglerie et affirme un gout pour l’acrobatie. Je rencontre Christian Coumin, pédagogue et metteur en scène de l’école, Mladen Matérick metteur en scène Yougoslave ainsi que Sébastien Barrier et Aurélien bory tous deux étudiants à l’école. J’intègre la section Sportif de Haut Niveau du Lycée Bellevue option cirque, ce qui me permet de candidater au CNAC ou je suis reçu en 1996.

Au sein de cette école qui déplace et forme mon regard de jeune acrobate, j’apprends la voltige. Je participe à un collectif acrobatique mêlant portée, voltige à la bascule et acrobatie. En parallèle, je découvre les danses urbaines, je m’échappe du CNAC les weekends pour découvrir les Battle de break dance aux Halles à Paris. Je m’en inspire. Je propose des travaux mettant en scène des images de mes parents dans les rôles de Père et Mère Ubu. Au cours d’un atelier de scénographie je réalise le portrait filmé d’un de mes partenaires de promotion Damien Caufepé. En mêlant humour et dérision, je mets en scène ses objets et son style de vie. Je filme autour de lui la vie de promotion. Un de mes projets s’axe sur l’acrobatie un art si singulier pratiqué partout sur la planète qui né dans de nombreux contextes. EN 1999, je participe à la fondation Baro d’Evel Circk compagnie avec la création du premier spectacle de la compagnie Porque no mise en scène par Michel Cerda et Sébastien Lalanne. La compagnie se structure et invite Armelle Vernier à la production et à l’administration. 

La 12 ème promotion du CNAC dont je fais partie est mise en piste par Francesca Latuada. Nous créons La tribu Iota, un spectacle sous chapiteau qui tournera en France et en Europe.

Parallèlement, je rencontre Maud Hufnagel, étudiante à l’école de la marionnette de Charleville Mézières. Elle me fait découvrir Raymond Depardon et ses Profils Paysans. Je suis fasciné par cette façon de filmer, par le documentaire et par la lumière faites sur ces gens que j’ai l’impression de connaître. Je reconnais mes grands-parents d’adoptions dans ces portraits si familiers. Je vois une retenue, un rapport au paysage, des physicalités, des rythmes de langue qui ont façonnée mon enfance. Je suis touché par ce travail. Je commence chercher à relier mes attachements biographiques ruraux et ma pratique circassienne. Je vois la frontière invisible entre les urbains et les ruraux. Je me dit qu’il n’y a pas de petits ou de grand voyages. Des récits cohabitent et coexistent à si peu de distance sans jamais se croiser. Ce frontières invisibles me fascinent. 

En 2002, pour l’année du Cirque, Christian Coumin me sollicite pour réunir une équipe afin de créer une pièce au Théâtre National de Toulouse. Une partie de la 12ème promotion se joint à moi pour former l’équipe de ce projet. Sébastien Barrier nous rejoint en tant qu’assistant à la mise en scène. J’invite une partie de ma promotion à se lancer dans cette aventure, nous créons la compagnie La Clique et une pièce voit le jour : Comme neige.

Aurélien Bory m’invite à rejoindre l’équipe de Plus ou moins l’infini et la Compagnie 111. La pièce est créée au Théâtre Vidy et mise en scène par Phil Soltanov. Je participe à la création de l'Opéra le Luttier de Venise au théâtre du Chatelet mise en scène par Georgio Barberio Corsetti.

Au cours de cette période je participe à plusieurs voyages avec Clowns sans frontières au Bangladesh, et aux Philippines organisés par Rima Abdoul Malack alors coordinatrice de l’association en France. Je voyage également au Cambodge avec l’association Clowns d’ailleurs et d’ici et j’interviens dans l’école phare Ponleu Selpack de Batanbang. Ces voyages sont très riches. Je découvre un monde complexe et profondément inégal. Je joue dans des prisons pour enfants, des décharges géantes, des bidons villes, des dispensaires publics ou j’éprouve les limites de l’art face à la grande détresse. Ces voyages sont profondément marquant.

En 2004 je pars au Japon avec Baro d’evel pour créer Voyage une pièce en collaboration avec Keisuke Kanaï une artiste Japonnais formé au CNAC. Ce projet est mis en scène par Sébastien Lalanne. Je rencontre Michiko Tanaka qui coordonne le projet au du Sapporo Art parc. 

Fondation du GdRA : 

En 2005, je propose à Christophe Rulhes de débuter un travail d’écriture scénique mettant en scène nos attachements au monde paysan, les arts du cirque, la musique, l’écriture et la vidéo comme outils de narration. L’association Nos autres / le GdRA est fondée. Je conçois la scénographie de la pièce. Nous invitons dans le même élan Sébastien Barrier à se joindre à nous pour écrire Singularités Ordinaires, la pièce fondatrice du GdRA.

Nous obtenons une première reconnaissance professionnelle avec le dispositif Jeune Talents Cirque qui nous offre une première visibilité. J’invite Armelle Vernier à se joindre à nous pour structurer la compagnie. Nous sommes accueillis au Channel à Calais grâce à Sébastien Barrier.

En 2010 Les pièces Singularités Ordinaires et Ethnographiques sont invitées au Festival d’Avignon. Cette grande visibilité accélère le développement de la compagnie et le GdRA obtient le soutient de la ville de Toulouse, de la région Occitanie et un premier conventionnement à la DRAC Occitanie au titre de compagnie de cirque.